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Jour 8 – Parma à Modena 

La splendeur des grandes journées, c’est de commencer par des faux départs. Un faux départ pour se lever plus tard qu’à l’accoutumée. Un faux départ pour partir du logement en trainant dans les valises et l’écriture du dernier article. Un faux départ après avoir mis nos bagages sur les vélos et se rendre compte que le pneu de Kiki était à plat. Un faux départ en beauté mais qui ne gâchera en rien notre journée qui commença par un bon verre de jus de pomme ! 

Les déboires de la veille pour le vélo de Kiki s’étaient réglées trop facilement certainement, d’où au petit matin, ce pneu à plat était là pour nous rappeler ce que les mécanos de Culture Vélo nous avait bien dit « Attention lorsque vous remettez les rayons à ne pas aller trop loin, vous pourriez percer la chambre à air », et c’est ce qu’il s’est produit très probablement. Nous avons roulé sur plus de 20km avant de nous arrêter sur un parking pour faire un changement de chambre à air en règle. Kikinette en a profité pour faire quelques photos et la cuisine du jour, pendant que Kiki s’activait pour régler ce problème en même temps qu’il devenait noir de graisse sur les jambes et les mains. Tout a tenu sur le reste de la journée, la suite des péripéties du pneu arrière de Kiki sont reportées au lendemain pour plus de surprises.

Les jours se suivent, nous roulons toujours tout droit vers Modena, nous écartant à peine de la trajectoire lors des nombreux ronds-points qui jalonnent la route, et pourtant aujourd’hui, il n’y avait pas une once de champs à l’horizon. Uniquement des constructions encore et toujours, comme si il n’y avait qu’une seule aire urbaine entre Parma et Modena. Point positif : il y avait une piste cyclable tout du long. Point négatif : il y avait une piste cyclable tout du long. Rouler sur une piste cyclable, sans tout le trafic des voitures et camions qui vous doublent sans cesse, est un pur bonheur d’habitude. Mais ici, en ce jour, c’était plutôt un calvaire. La piste cyclable n’était pas entretenue, des trous partout, tout le temps, ce qui nous poussait à zigzaguer entre la route et la piste. Bien dommageable surtout que l’idée de donner un espace libre au cycliste était plus que louable… mais amoindrie dans sa réalisation (ou du moins son entretien). Notons aussi, mais cela est valable aussi en France, qu’il faudrait arrêter de « casser » la piste cyclable lorsqu’il y a une route, mais plutôt penser à faire une seule voie cyclable, puis rajouter des « cassures légères » pour les voitures. Les pneus des cyclistes en seront que plus heureux.

Le panneau Modena se dresse devant nous. Pourtant, pendant plus de 5/7km nous allons traverser une immense zone commerciale où les magasins étaient légion. Avant de tomber sur le cœur historique de la ville. Et là, contraste sans fard, plus rien ou presque. La rue principale accueille quelques enseignes haut de gamme et des boutiques de prêt-à-porter, et s’en ai fini. Contrairement à la veille à Parma où il y avait du monde partout, nous n’avons croisé que très peu de monde à Modena entre 16h30 et 20h00. Il y avait bien un peu de monde en terrasse dans les bars, à siroter quelques cocktails ou verres de vin tout en grignotant des pizzas et foccacia… mais passé cela, nous nous sentions bien seul dans une ville au patrimoine classé à l’UNESCO. Des merveilles d’architecture qui se dressent fièrement dans une cité très typique, aux couleurs jaune, rouge et orange. Ici aussi, les voitures semblent bannies du centre-ville, pour laisser la bicyclette seul maitre des rues avec les bus qui sillonnent les artères principales.

Pendant que Kikinette recherche l’angle parfait pour ses photos, étudiant la luminosité et tous les détails de sa composition, Kiki se délectent d’un mur empli d’œuvres de street-art. Un peu plus tôt dans la journée, il s’était rappelé du nom de l’artiste Clet Abraham dont les œuvres tapissaient les panneaux de Parma. A essayer de le chercher la veille, il n’avait su le dire à Kikinette en les voyant, et cela l’avait travaillé. Mais pas aussi durement que le choix de trouver le restaurant du soir. Nos aventuriers en herbe se demandent de plus en plus si les villes italiennes ont des restaurants dans leur cœur de ville ou si ils ont tous été expulsé en dehors pour attirer les gens ailleurs. Jamais il n’aura été aussi difficile de se restaurer que depuis quelques jours, et nous recherchions seulement des plats italiens. Mais n’ayez crainte, nos ventres sont rassasiés, et Kikinette se moque sans problème de celui de Kiki qui semble avoir tout le temps faim. 

Au travers des rues de Modena, nous vagabondons une dernière fois aux lumières des lampadaires, pour nous en rentrer vers notre auberge de jeunesse. La fatigue peut se lire sur les visages, et aucun des deux ne se fera prier pour se coucher plus tôt que la veille. Voilà notre 8ème jour qui se termine, et nous sommes toujours plus déterminés que jamais à faire mentir les bookmakers !

Jour 9 – Modena à Bologna 

Dormir dans une auberge de jeunesse, c’est prévoir d’être potentiellement en décalage avec les autres pensionnaires. Quand pour nous c’est l’heure de dormir, pour d’autres, cela n’arrivera que bien plus tard dans la nuit. Et idéalement, au petit matin, nous nous retrouvons presque seul dans la pièce commune à manger nos deux viennoiseries et à faire notre vaisselle de la veille que nous avions oublié au fond de nos sacoches.

Le premier check-up de la journée sera pour le vélo. Une légère pression de la main sur le pneu arrière pour se rendre compte que tout est en ordre. Nous pouvons repartir l’esprit léger, en oubliant qu’il fallait regarder ce couinement dans la roue avant. Surement les freins que Kiki regardera un autre jour. La route pour Bologna n’était pas ce qui était le plus long. Une quarantaine de kilomètres environ, pour presque dix dans la seule ville de Bologna (du panneau d’entrée à notre B&B du jour). Une grande ville comme nous ne l’imaginions pas et qui allait nous offrir une grande balade.

Mais avant d’y venir, un aparté est nécessaire pour parler des personnes que nous avons « rencontré » ces deux derniers jours. D’habitude, le klaxon est synonyme d’énervement de la part de son utilisateur, et pareillement pour celui qui le reçoit. Mais là… nous avons eu à plusieurs reprises de franches salutations de la part de camions ou voitures pour nous supporter. A voir les gens nous faire des signes de la main, de nous dire un petit mot en passant… c’est tellement revigorant ! On se sent comme neuf avec encore plus de peps que jamais pour nous conforter dans notre aventure.

La chambre n’étant prête que vers 15h, nous avons plus de deux heures de temps à tuer. Quelques courses par-ci, un tour de pédale plus loin, et nous voilà sur la place centrale de Bologna. Un monde fou, partout, assied sur les marches, à déambuler, ou juste assis à la terrasse des nombreux cafés. Nous jetons notre dévolu sur quelques marches, en face d’un homme qui crée des énormes bulles de savon. De quoi passer le temps en regardant les gens s’amuser avec les dites bulles pour les suivre, les filmer ou juste les tuer en plein vol de leur doigt. Nous, nous mangeons tranquillement, avant de repartir à pied poussant nos vélos dans les rues de Bologna. Il est 16h, nous repartons de notre appartement après avoir consciencieusement fait notre lessive intégrale pour la première fois. Le soleil est toujours là, nous pouvons partir à l’assaut de la ville.

Nous vagabondons au gré des graffitis et œuvres que nous croisons dans les ruelles, cherchant pour Kiki de nouvelles photos à réaliser, tandis que Kikinette préfère elle se concentrer sur l’architecture environnante. Deux styles, deux points de vue différents sur une ville. Une complémentarité assez ingénieuse pour ne rien louper, chacun avec son œil. Nos ventres sont bien remplis, pourtant, marcher semble nous ouvrir l’appétit. Alléché par l’odeur depuis plusieurs jours, nous craquons enfin pour un petit plaisir sucré et froid. Cela sera une bonne glace chacun pour nous permettre d’être vraiment sur que les dizaines et dizaines d’échoppes de glaciers que l’on croise dans chaque ville valent la peine d’exister pour être dégustés. 

Ni une, ni deux, les glaces ont fondu comme neige au soleil sous nos coups de langue. Il n’en fallait pas plus pour arriver face à la Basilique San Petronio de la place Maggiore. Si la place est déjà immense et entourée de bâtiments encore plus imposant dans un style à l’italienne bien marqué par l’âge, que dire une fois dans la Basilique… Ses proportions sont juste titanesques. Nous restons bouche bée devant le spectacle, nous imaginant comment avait dû être la construction d’un tel édifice. C’est même une question récurrente que nous avons depuis quelques jours face à la grandeur et la splendeur des cœurs de ville italiens. Trois autres Eglises seront visitées ce jour-ci également, pour assouvir la soif de photo de patrimoine religieux de Kiki. Il faut dire que payer 2€ pour la Basilique l’avait un peu laissé sur les dents, ne pouvant relater ce joyau en image. Alors nous nous sommes vite rattrapé. Pour le reste, nous marchions, de-ci, de-là, parfois dans des grandes artères bondées de monde, parfois dans de petites ruelles désertes. Le grand pôle universitaire de la ville doit jouer pour beaucoup sur la vie qui y règne, car de ce que nous avons pu voir, la moyenne d’âge a rapidement chuté à Bologne par rapport aux précédentes villes traversées. On se dit aussi qu’aujourd’hui il aurait été facile de trouver notre bonheur culinaire pour le soir…

Mais nous avons choisi de rester tranquille à la maison et de nous faire un petit plat maison. De quoi nous restaurer en quantité, tout en pouvant être rapidement devant l’ordinateur pour regarder le match de Monaco. Oui, oui, même en plein milieu de l’Italie, ce fut une soirée foot pour admirer une magnifique qualification de l’ASM, aux cris de Kiki réveillant l’immeuble lors du troisième but et du coup de sifflet final. Quoi de mieux pour terminer en beauté la journée, et partir dormir en pensant aux prochaines journées qui nous rapprochent de plus en plus vers la côte est de l’Italie. Encore un peu et nous y serons.

Jour 10 – Bologna à Cesena 

La lumière douce du matin s’insinue dans la chambre. Kiki a depuis deux nuits l’habitude de laisser les rideaux presque ouverts pour pouvoir se réveiller au petit matin. Le noir absolu poussant à dormir plus longtemps qu’à l’accoutumé, et ne voulant pas mettre de réveil, il s’agit là de la meilleure solution pour se lever en douceur. Les odeurs de café commencent à se dégager lentement dans la cuisine, poussant Kikinette à se lever pour prendre son petit-déjeuner. Ce matin était un peu spécial pour nous, nous pouvions enfin manger nos mueslis avec un bon yaourt blanc et de la confiture. Une petite différence importante pour nous. Une fois notre gargantuesque déjeuner consommé, les vélos chargés, le GPS presque endormi, nous voilà sur la route des vacances… Du moins, comme dit Kiki, nous ne pouvons plus utiliser ce terme maintenant, car cela impliquerait de travailler. Et pourtant, nous travaillons à notre manière, à voyager pour relater ce que nous rencontrons, en images ou en mots.

Soyons direct, la journée a été bien pauvre pour nous en grandes sensations. C’était principalement de la route pour de la route, afin de nous rapprocher au plus près de la côte et de Rimini… et nous avons ainsi dépassé les 90km au compteur. Nos fesses ont bien senti la distance, croyez-nous, mais elles s’adaptent plutôt bien à la selle… ou inversement, nous ne savons pas. Les villes et villages ont défilé sur la route, comme le nombre de voitures et camions qui nous ont doublé. Parfois sur la piste cyclable, parfois sur le bitume, nous alternions en fonction de l’état de la première ou du trafic de la deuxième. A croire que personne ne prend l’autoroute en Italie et que seules les départementales et nationales sont utilisées. On s’arrête de-ci, de-là pour que Kikinette puisse prendre quelques paysages, puis nous remontons aussi sec sur nos vélos. 

Il est 13h00, nous concédons à faire une pause syndicale pour nous restaurer. Pas de panini ce jour-ci, mais des croissants au jambon cru. Le tout froid, pas chaud et bien gras comme nous les connaissons chez nous. Plus simple, mais toujours aussi bon pour remplir l’estomac. Nous nous posons au soleil, les jambes qui décompressent sur le parking, et nous regardons un papy reprendre sa voiture. Et le voilà à tenter de reprendre la nationale… Un bon fou rire. Il ne regarde que d’un côté pendant plusieurs minutes, avant de se rendre compte que des voitures pouvaient arriver de l’autre aussi. Enfin il s’élance… pour tourner 10 mètres plus loin et se garer chez lui. Enorme fou rire à nouveau. Plus de temps à manœuvrer qu’à rentrer à pieds. Nous, nous repartons tranquillement sans nous poser autant de question au démarrage, juste nous dire « faut-il garder notre veste ou l’enlever », un énorme dilemme entre le soleil tapant et le vent qui nous fouette gentiment.

On y repense. Il y a bien une chose que nous ne comprenons toujours pas en Italie, une de leur coutume. Celle-ci consiste à afficher à l’entrée de la ville sur un panneau d’information les portraits des ancêtres, surement disparus depuis bien longtemps. On y lit des dates du 19ème siècle pour preuve de naissance. On se questionne beaucoup sur ce point. Un hommage à ceux qui ont fait la vie de la cité ? Un moyen pour les familles de se remémorer les êtres chers ? Ou de simples avis de décès que la famille publie pour informer tout le monde ? On essayera de demander à un italien avant de partir la raison de ces panneaux.

La fin de journée tombe, nous venons de traverser Forli et deux autres villes qui arboraient fièrement de magnifiques châteaux en leur cœur et des remparts pour les protéger. Les kilomètres s’accumulent, et nous ne trouvons toujours pas un coin d’herbe pour planter la tente. Est-il donc impossible de camper en Italie à ce point ? Nous poussons toujours plus, mais nous nous résignons les 16h00 passés à nous tourner vers la recherche d’un hôtel. Il nous faudra plus de trente minutes et un petit détour pour en trouver un. Bingo. Ou pas quand on nous annonce le prix de la chambre. Il est tard, nos jambes veulent une bonne douche chaude, on ne négocie pas, ni ne tentons de chercher ailleurs. La ville la plus proche étant à plusieurs kilomètres, nous ne nous sentons pas âme plus valeureuse en ce jour. Les sacoches sont posées, un petit tour à la superette, et nous voilà à festoyer dans notre chambre du jour. Il est 20h20, les mots s’arrêtent là.

Data depuis le début 

  • Kilomètres parcourus : 642,74
  • Temps sur le vélo : 1j18h10min18s
  • Altitude : 3805+ / 3879-
  • Calories dépensées par personne : 22120
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