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Jour 33 – Istanbul

Au programme : petite grasse matinée jusqu’à 8h30, petit-déjeuner dans la salle de notre auberge de jeunesse, petit tour rapide du voisinage par Kiki pour ne pas trouver de réparateur de vélo, et petit départ vers les 10h00 pour explorer le Nord d’Istanbul. Point besoin de partir tôt quand toute la journée vous allez marcher, et encore marcher, et encore marcher à travers une ville tentaculaire aux multiples vies. Nous passerons à travers tous les styles et toutes les classes sociales, en restant sur cette rive Nord d’Istanbul européenne. Les quartiers se suivent mais ne se ressemblent pas. Chacun ayant son identité propre, son mode de vie et sa « culture » dominante. Nous marcherons plus de 25km dans la journée, avec plusieurs pauses au programme. Plusieurs pauses pour manger, manger encore, boire du thé, et encore boire du thé. Si il y a bien une activité qui ne connait pas la crise, c’est bien vendeur de thé, tant cette boisson est consommée au quotidien. Et nous n’y échappons pas non plus. Un régal.

La journée sera plutôt « calme ». Des militaires et des policiers dans tout Istanbul. De nombreuses rues interdites d’accès. Un trafic plutôt calme dans le centre historique. Et pour cause. Le président Erdogan donnait ce même jour un grand meeting sur la grande place. On ne sait pas pour quoi, mais dans toute la ville, vous pouviez voir des banderoles et des affiches annonçant sa venue. Kiki s’est demandé quel pouvait être leur budget communication pour ce « simple » événement, compte tenu du déploiement massif de communication à l’égard de cela. Démesuré. Comme tout semble l’être au niveau politique ici. Ce ne sera que le soir, en rentrant à l’auberge, devant la télé du salon à boire notre thé que nous verrons quelques images du meeting qui a rassemblé une foule immense. Heureusement pour nous, nous n’étions pas dans ce quartier aujourd’hui. Pi bon, allez dire à nos mères respectives que nous étions en plein milieu à agiter des drapeaux et crier avec la foule. Vous voudriez qu’elles aient un infarctus ? Nous sommes très sages pour savoir rester loin de ce type d’événement.

Le Bosphore s’avance à grand pas. Nous le traverserons sur le pont de Galata afin de rejoindre la tour du même nom. Elle se dresse, belle et immense, sur la colline de la Corne d’Or. Une des plus vieilles tours au monde qui aurait plus de 1500 ans. Elle a surtout connu de nombreux changement depuis l’époque, passant du bois à la pierre, avant de brûler à de multiples reprises alors même que sa fonction était à l’époque de surveiller les départs de feux. L’ironie. Un peu de monde se presse en bas, en même temps que les gouttes commencent à tomber. Une chance pour nous, car le temps que nous en finissions avec elle, il devait y avoir au moins 50 personnes ou plus à attendre. Un ascenseur plus tard et quelques marches, un panorama circulaire s’étale devant nos yeux. Une vue imprenable sur tout Istanbul. Magnifique. Nous ferons deux fois le tour, pour être sûr de n’avoir rien loupé. Il faut dire que le monde se presse sur ce minuscule chemin de ronde où il est difficile de passer à deux. Photos et vidéos dans la boite et dans les yeux, nous pouvons redescendre en nous disant que pour tout faire à pied, cela serait vraiment très très long.

Nous remonterons ensuite pendant une bonne heure la rue Istiklal. Une artère principale, piétonne, bondée, et regorgeant de magasins en tout genre. Grandes marques côtoyant petits magasins et vendeurs ambulants. Nous nous arrêterons seulement à l’un de ces derniers pour prendre un simit, une sorte de pain tressé afin de « commencer » notre journée. Et pour le reste, nous contemplerons avec les yeux. Amusés en nous disant que nous n’avons plus besoin de tout cela désormais. Que nos seuls achats seront orientés nourriture de toutes les régions du monde. Nous passons devant le Consulat Français, heureux de voir quelques mots dans notre langue, puis nous nous rappelons qu’ils ne nous ont pas répondu à notre email les prévenant de notre séjour. Pas grave, une prochaine fois nous irons leur dire bonjour. Direction l’hôpital un peu plus loin pour demander après notre vaccin. Là, nous tombons nez à nez avec cinq policiers dans le hall d’accueil. Nous nous disons qu’ils ne rigolent pas avec la sécurité ici. Puis quelques minutes plus tard, nous comprenons qu’une partie escortait une personne simplement. Nous ne trouverons pas de vaccin ici non plus, il faut aller dans une pharmacie. Nous en trouverons une qui pourra nous faire l’injection un peu plus tard dans la journée. Une chose de finie.

Entre rayons de soleil et petite pluie, nous décidons de nous poser manger sur le pouce dans un petit restaurant. Nous pensions avoir nos deux döners pour 10LT, cela sera le double car le service n’était pas inclus. L’erreur de base. Nous prendrons à emporter la prochaine fois. Mais cela nous a permis de nous poser un peu au chaud pendant une petite demi-heure. Nous repartirons, toujours plus au Nord en suivant le Bosphore, passant devant le Palace Dolmabahçe. Là, nous tombons sur une immense rue sans fin que nous décidons au bout d’une quinzaine de minutes de rebrousser en sens inverse puisqu’il n’y avait rien. Rien à part des grands murs des deux côtés et des universités. Rien de bien passionnant. Alors pour changer du plat, nous montons sur les hauteurs nous perdre dans quelques rues vides. Les pavés nous amèneront alors sur un immense marché à côté du quartier de Beşiktaş. Sur deux étages. Le premier sera rempli d’étals de fruits et légumes, à des prix alléchant, au point de vouloir en acheter pour cuisiner. Le deuxième sera un immense marché aux vêtements et ustensiles en tout genre. Nous n’en revenons pas de voir autant de monde qui déambulait dans ses petites veines, comme la veille dans l’immense bazar.

De fil en aiguille, nous tombons dans les souvenirs de Kiki. Les Champs Elysées d’Istanbul. Là où se trouvait son hôtel lors de son séminaire. Et avec du recul en se rappelant toutes les activités qu’il avait fait à l’époque, et en ayant fait la même chose à pied aujourd’hui, il se dit que le bus n’était pas vraiment utile à l’époque, tout aurait pu être plus rapide à pieds dans la journée. Le jour et la nuit encore une fois. Vous passez d’un marché de bric et de broc, à un petit bidonville avant d’arriver sur ce quartier huppé et riche d’Istanbul. Pas besoin de regarder les prix pour comprendre le changement radical d’ambiance. Boutique avec quelques objets à vendre, terrasse de café propre, boulangerie avec des petites pâtisseries, rues en parfait état. Quelques pas avaient suffi pour ce changement de décors. Et la population qui s’y trouvait était elle aussi bien différente, un style plus sophistiqué, un style plus touristique. Nous y ferons un rapide tour pour quand même sentir cette ambiance, avant de nous poser dans un jardin juste à côté. Un thé et un gâteau plus tard, nous continuerons de nous perdre dans quelques rues avant de redescendre sur les bords du Bosphore.

Le quartier de Karaköy nous attendait. Là aussi, nouvelle ambiance. Plus jeune, plus branché, plus festive. Des bars et des restaurants de partout. Du street-art en toile de fond sur l’ensemble des murs. Nous hésitons quelques secondes en voyant quelques belles assiettes avant de nous asseoir à l’un des bars. Ici, tout le monde boit, locaux comme touriste, et l’alcool ne semble pas être un problème comme dans d’autres quartiers. Il est 18h00, et nous commanderons une pizza énorme pour deux. Nous n’avons plus trop d’heure pour manger ici, nous le faisons continuellement pour dire vrai. Nous marchons beaucoup pour nous dédouaner intérieurement. Car après ce repas, après s’être encore perdu dans quelques ruelles pour que Kiki puisse prendre des photos d’œuvres ici et là, nous nous sommes une nouvelle fois arrêté prendre un simit. Cette fois, c’était le dessert, alors nous demandons d’y ajouter du nutella en plus. 

Nous rentrons en passant par le bas du pont Galata cette fois, le long des restaurants. Dehors, des rabatteurs essayent de nous inviter à regarder la carte de leur restaurant. Et à chaque fois, ils nous parlent en espagnol. Il faut dire que depuis que nous sommes en Turquie, on nous prend pour des Espagnols, et cela les surprend toujours quand nous disons être Français. Sûrement le bronzage qui fait ça. Si ils pouvaient voir nos bras ou nos jambes, ils ne diraient pas la même chose. Autre moment, autre histoire intéressante. Nous marchions tranquillement quand un cireur en face de nous fait tomber sa brosse. Nous l’en informons. S’engage alors rapidement la conversation et il veut alors nous remercier en nous brossant les chaussures. Nous déclinons rapidement car il s’agit en fait d’une vieille astuce pour trouver des clients. Une fois que la personne a accepté et qu’il a commencé, le cireur vous demandera toujours de le payer au final. La brosse ne tombant jamais par hasard. 

Il est 19h00, nous sommes sur les rotules et un peu frigorifié après cette longue journée de marche, entre pluie et froid. Nous décidons de rentrer pour nous poser un peu afin de pouvoir être d’attaque pour notre deuxième grosse journée de demain qui s’annonce très visite du cœur touristique d’Istanbul.

Jour 34 – Istanbul

L’avantage de notre auberge de jeunesse, être situé en bas du cœur historique d’Istanbul. A deux pas du Grand Bazar. A deux pas du Palace Topkapi et des Grandes Mosquées. Après un réveil léger, pas comme notre premier repas, nous partons vers les hauteurs pour commencer notre journée par la visite du Palais Topkapi. Comptez deux à trois bonnes heures pour faire le tour complet de cet immense lieu. Comptez aussi une bonne demi-heure pour acheter vos tickets. Un conseil, prenez le pass Musée d’Istanbul, pas comme nous, pour avoir accès à une multitude de musées, dont l’entrée à la Cathédrale Sainte Sophie. Il vous en coûtera 85LT. Pour une utilisation sur cinq jours et un coupe file bien pratique.

Après une fouille réglementaire, comme dans la plupart des monuments et lieux publics que nous avons pu faire (portiques de sécurité, police ou armée), nous voilà dans la cour du Palais. Les nuages gâchent un peu la partie, même si cela donnera un autre sens à nos photos. Une foule se presse dans tous les sens. Touristes comme locaux, tout le monde semble être là. Et nous aussi. Premier arrêt, les anciennes cuisines. Non pas que nous avions faim, mais il semble que cela nous rattrape toujours. A l’intérieur, la démesure de l’époque. Des marmites gigantesques où deux ou trois personnes pourraient tenir dedans. De quoi cuisiner pour au moins plus d’une centaine de personnes facilement. On apprendra qu’à l’époque, il pouvait y avoir presque 5000 personnes qui vivaient à l’intérieur des murs du Palais. Et ce nombre augmenta à 10000 quelques siècles plus tard. On comprendra l’importance des cuisines et leur taille hors norme. Des plans de travail où nous pourrions dormir. Mais chaque pièce à sa fonction, l’une est réservée à cuisiner pour le Sultan, l’autre pour les hauts dignitaires, et d’autres enfin pour le personnel. Il y aura d’autres cuisines encore plus loin, dans le Harem pour les concubines et leur suite. 

La visite des cuisines est plus une exposition des rares objets qui ont pu être sauvés des différents incendies et incidents qui eurent lieu dans le temps. Mais quels objets ! De la vaisselle en porcelaine d’une précision parfaite, finement décorée, qui montre tout le savoir-faire des artisans de l’époque. Une manufacture à la pointe. Et que dire de ces bols incrustés de joyaux et autres pierres précieuses. Une rare beauté qu’il est possible d’admirer. Plus loin, une des salles sert pour concevoir les potions et autres médicaments. Des fioles toutes plus scintillantes les unes que les autres se présentent dans les vitrines. A regarder plus attentivement les contours ou les bouchons, on pouvait explorer tout un monde en quelques secondes. Et là, nous tombons sur d’autres objets importés des pays européens au cours du 17/18ème siècle. La différence est immédiate. On retrouve énormément de vaisselle fleurie ou avec des animaux, comme c’était l’habitude chez nous. Un style qui dénote énormément dans l’Empire Ottoman de l’époque. Mais à ce moment, la culture Ottomane semblait s’être éprise par l’un de ses Sultans de la culture Occidentale. Dommage pour eux nous nous disons, car ils avaient jusque-là exposé des pièces d’une rare beauté qui sont à l’opposé du style Occidentale. Les goûts et les couleurs vous savez… cela ne se discute pas trop, chacun vous dira son point de vue.

Les cuisines derrière nous, nous entrons par une grande porte dans la seconde partie du Palais. Il faut noter que de nombreux bâtiments ou pièces intérieures sont encore en réfection, ce qui peut « gâcher » le paysage. Mais avec l’âge des structures, on comprend facilement l’importance des restaurations constantes pour avoir un lieu aussi magnifique à faire visiter. Nous visiterons de nombreuses pièces ouvertes au public ici et là. Là une petite Mosquée par exemple, avec une vue imprenable sur le Bosphore. Très simple, très petite. Là une pièce où le Sultan recevait ses ministres en audition. Des dorures sur les murs avec des versets du Coran, d’énormes banquettes pour que tous puissent s’asseoir. Là une petite bibliothèque. Des niches encastrées dans le mur, des mosaïques d’un bleu étincelant sur les murs. Là les appartements privés du Sultan. Des lits énormes pour 8 personnes, des peintures d’une rare beauté sur les murs. Partout où vous pouvez regarder, vous resterez stoïque face à une telle ingéniosité, une telle beauté et une telle grandeur en un même lieu. Que dire alors quand nous sommes entrés dans le Harem, une sorte de petit palais dans le palais, avec ses dédales, son nombre incalculable de portes et de passage. Si les premiers couloirs vous font penser que tout est en restauration, vous arrivez ensuite dans deux magnifiques pièces qui vous couperont le souffle. Les gravures, les dorures, les couleurs, les tapis. L’une dans les couleurs rouges, l’autre dans les teintes de bleu. Chacune ayant son âme propre et son énergie. 

Les heures passent rapidement, bientôt l’heure du déjeuner arrive. Mais avant de partir du Palais, nous traversons deux autres petites expositions. La première sur l’horlogerie. Des pendules et des montres de plusieurs siècles en arrière, toutes plus décorées les unes que les autres. Ici un griffon portant un cadran en son cœur. Là une montre à gousset sertie de pierres précieuses. La deuxième sur les armes. Des épées d’une finesse et d’un travail d’orfèvre. Les inscriptions sur les lames nous laissent songeur. Avant de tomber nez-à-nez sur une épée longue de plus de deux mètres. Immense et imposante, qui pouvait bien la manipuler. Les costumes et armes d’apparat des Sultans demeurent d’une beauté sans égale. Nous sortons, parcourons un petit jardin bondé de monde, pour nous retrouver sur la place devant la Cathédrale Sainte Sophie. Ni une, ni deux, nous essayons de trouver un marchand pour nous restaurer. Et là, nous voilà accosté par un groupe de jeunes étudiants ERASMUS. La personne en charge nous demande si nous voulons bien parler un peu avec eux en Anglais pour les faire travailler. Nous leur racontons alors notre histoire et les questions fusent alors. Le temps de prendre une photo tous ensemble et de leur donner nos coordonnées, nous les quittons pour manger sur la place. En y repensant, eux aussi pensaient que nous étions Espagnols. 

Kiki n’est pas au meilleur de sa forme depuis le petit matin. C’est à son tour d’être malade. La nourriture ou le vaccin de la veille, nous ne saurons pas. Néanmoins, il était hors de question de ne pas visiter les deux Mosquées qui se faisaient face. Nous entrons alors dans Sainte Sophie en premier. Des proportions hors norme. Une fois dans son cœur, votre regard se porte directement vers le haut. Instinctivement. Naturellement. Vous regardez alors les dorures et les peintures au plafond. Mais aussi ces immenses disques verts avec des inscriptions en lettres d’or. Elles vous captivent. Elles vous fascinent. Puis vous prenez un petit chemin qui vous emmènera au premier étage. De là, vous avez une vue plongeante. Votre regard se perd, avant de revenir sur les décorations sacrées que vous trouverez à cet étage. Mêlant un style Chrétien et Islamique, Sainte Sophie est une œuvre qui a su évoluer au travers des siècles pour être un parfait mélange des genres. L’une des plus grandes Cathédrales de son temps. Nous sortons sur les jardins qui séparent les deux imposants monuments. Nous flânons un instant avant de nous diriger vers la Mosquée Bleue. Le soleil aurait pu faire étinceler son bleu pétillant, mais nous aurons toujours des nuages pour compagnie. Qu’importe, l’intérieur lui nous fera étinceler de mille feux. Tenue correcte exigée, pour les hommes comme pour les femmes. Pour les femmes, le voile est obligatoire, et pour les jeunes femmes, il faudra rajouter un voile par-dessus les fesses pour cacher les formes. Sinon interdiction de rentrer. Les chaussures elles, seront enlevées et mises dans un sac plastique. C’est pieds nus que l’on rentre dans les Mosquées. Là, trois espaces bien distincts. Au cœur, l’espace pour les hommes venant prier. Certains viennent et discutent doucement, tandis que d’autres prient. Un autre pour les touristes, pour qu’ils puissent admirer ce joyau. Et enfin, un autre au fond, pour les femmes souhaitant prier. Bien à l’écart des hommes et en retrait. Nous nous assiérons pendant un bon moment dans la Mosquée pour admirer tous ses détails mais aussi profiter du calme du lieu malgré le monde qui n’arrêtait pas d’entrer et sortir. 

Apaisant. Reposant. Mais pas assez pour que Kiki reprennent des forces. Cela sera fin de journée dans la chambre à se reposer, tandis que Kikinette en profitera pour sortir un moment explorer le quartier proche pour faire quelques photos. Nous décidons néanmoins de sortir manger au restaurant pour notre dernière nuit à Istanbul. A partir de demain, nous essayerons de reprendre de bonnes vieilles habitudes. Et c’est en voyant un chat, que nous repensons à hier. Istanbul est la ville à la centaine de Mosquées, mais c’est aussi la ville des chats. Ils semblent être adorés ici malgré que la plupart soient errants. Nous en voyant partout, tout le temps. Les gens les nourrissent bien, et aucun ne semble vraiment famélique. Il faut dire que dans certains endroits, des abris leur ont été construits pour qu’ils puissent avoir un toit sur leur tête. Dans un jardin où nous nous étions posés, il y avait même un distributeur de croquettes. Les gens devaient juste recycler leurs déchets pour que la nourriture tombe dans des gamelles. Un « paradis » pour les chats.

Jour 35 – Istanbul à Fadilli

Après plus de trois jours, nous devions dire au revoir à Istanbul. La grande. La magnifique. La resplendissante. Nous l’avons traversé de part en part sur sa rive européenne. Ses allées. Ses ruelles. Ses rues. Nous étions passés par tous les styles de vie. Toutes les cultures. Tous les extrêmes. Et cela dans une même ville, parfois en traversant la route. Puis on se rappelle que Kiki est malade. Il se dit intérieurement qu’être malade dans ce type de voyage est surement le plus compliqué. Nous ne sommes pas dans notre petite maison, bien au chaud, coucouné, avec tous les médecins et médicaments que nous voudrions. Puis on se rappelle que nous sommes à Istanbul. Et tout cela s’en va très rapidement. Nous disons au revoir à notre petite auberge, et nous nous engageons sur le bord de mer à la recherche du quai du ferry. Nous ferons un beau détour grâce à des panneaux trompeurs. Mais cela nous permettra de voir la place où Erdogan avait tenu son meeting. Immense. La scène, le système de sécurité, la communication. Tout. Démesuré. Nous avons lu la veille dans la presse française ce qui se dit sur le pourquoi de ce meeting. On se dit que les choses peuvent évoluer rapidement dans les semaines à venir, mais on ne s’en fait pas, la géopolitique nous intéresse moins que l’humain que nous pouvons croiser au quotidien. 

Billets en mains, après avoir fait la queue comme à la sécurité sociale avec son ticket pris à la borne, nous patientons. Le ferry va partir d’ici une dizaine de minutes. Nous montons avec nos vélos. Nous sommes un peu les énergumènes du jour, pensons-nous. Mais non, la veille, un Norvégien avait pris lui aussi le ferry. Peut-être le rencontrerons-nous sur la route. Plus tard dans la journée, nous apprendrons qu’un autre couple de cyclotouristes français va arriver avec deux jours de décalage dans l’une de nos prochaines étapes. Qui sait ce que nous réserve la route. Pour l’heure, c’est le bateau. Un petit par rapport à celui qui nous amena d’Italie en Grèce. Et il bouge bien avec les vagues. Très bien même. Kiki se dit qu’il va dormir un bon coup pour oublier cette sensation intéressante. Kikinette en fera de même sans avoir le mal de mer pourtant, juste par envie. La traversée se fit beaucoup plus rapidement au final. Nous ne vîmes pas passer les une heure et demi. Nous voilà déjà pieds à terre, avec de la nourriture en main. Une petite côte, et nous décidons de nous arrêter en plein milieu d’un pont pour piétons. La vue est belle, le vent est stoppé, le soleil nous caresse gentiment. On mange. 

Nous n’avions pas beaucoup de route à faire à la base. Nous voulions simplement rallier Bursa, nous installer dans un camping de sa périphérie et se préparer aux prochaines étapes. Après une belle montée sur la bande d’arrêt d’une trois voies, puis une descente tout aussi parfaite, nous arrivons devant le camping. Fermé. Le gardien ne nous dit pas pourquoi, mais il semble fermé pour aujourd’hui. Nous nous regardons. Décision est rapidement prise de continuer vers notre prochaine ville. Nous nous arrêterons quand nous en aurons envie ou quand la fatigue sera trop lourde. Qui aurait pensé que notre GPS nous ferait prendre un chemin de terre sur une dizaine de kilomètres à travers les champs pour « aller plus vite ». Nous rigolons et nous avalons sans problème cette petite route ensoleillée. Nous passerons ensuite deux villes. Les deux semblaient en pleine construction. Des chantiers de partout. Comme si une ville champignon poussait à cet endroit-là. Puis le lac. Une vue à couper le souffle. Comme la dernière montée que nous firent de la journée. 10%. 10%. 10%. Vous pensez vraiment que nous l’avons fait sur nos vélos ? La majeure partie, oui. Une autre, à pieds pour nous reposer. Il faut dire qu’une telle pente ne vous laisse pas de marbre. Elle vous fait suer. Mais comme toujours, la vue qui arrive après l’effort vaut mille fois de l’avoir fait. 

Une petite route en terre descend. Kiki part voir si il est possible de s’y installer. Après inspection, nous sommes à l’abri des regards, le terrain est presque plat, et la vue sur le lac est magique. Les vélos sont posés, la tente ressortie de son sac. Elle devait penser que nous l’avions oublié la pauvre. Mais non, nous n’avions pas réussi jusqu’alors. Nous la préservions pour lui offrir ce spectacle. Tout est rangé, tout est attaché, nous nous posons un peu plus loin pour admirer la vue et faire quelques clichés. La suite, comme lorsque nous campons, sera écriture, traitement des photos et préparation d’un petit plat pour le soir. Rien d’extraordinaire, juste des basiques si plaisant.

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