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Jour 48 – Aksaray à Selime

Petite nuit. Grand réveil. 8h00. Ismaël et sa sœur étaient déjà réveillé depuis un petit moment. Elle a nous préparé le petit-déjeuner, lui est allé chercher du pain frais à l’extérieur. Le temps de prendre une douche pour Kiki après s’être écroulé la veille au soir dans le lit, contrairement à Kikinette, nous voilà assis en tailleur dans la cuisine à rompre le pain et manger des frites. Pour Kiki, ces frites lui ont rappelé celle de sa grand-mère, délicieuses et croustillantes. Parfait pour attaquer la journée comme il se doit. Nous chargeons nos vélos et partons vers notre point de rendez-vous. En chemin nous croisons Laurène et Philippe qui sortent d’un restaurant où Mehmet les a emmenés déjeuner. Nous arriverons donc tous ensemble à la Clock Tower. Là, cinq cyclistes nous attendaient, dont Melih, notre contact Warmshowers d’Askaray. Ils font tous partis du même club de cyclisme : ABIG (Aksaray Bisiklet Gezginleri). Ils sont aussi tous équipés pour la pluie, personne ne sachant vraiment si nous allions l’avoir dans la journée ou non. Heureusement, nous l’éviterons comme il faut pour profiter même d’un rayon de soleil en fin de journée.

Tout le monde est là, nous pouvons partir. Voilà un énorme convoi de cycliste qui s’en va sur les routes pour rejoindre Selime et ses grottes. Très rapidement, nous quitterons l’asphalte pour nous aventurer sur les petits chemins de terre afin de profiter de paysages magnifiques. Il s’agira pour nos hôtes cyclistes de nous faire faire une journée découverte de la région entre Askaray et Sélime. Nous n’avancerons pas très vite, mais nous profiterons sans commune mesure de la nature environnante assez impressionnante. Dans le groupe, nous avions avec nous un dentiste, un ingénieur agronome, un professeur d’anglais, un concessionnaire automobile et un étudiant. Tous les âges, tous les horizons, tous avec la même passion du vélo. Tous les dimanches, qu’il pleuve, neige ou que le soleil soit là, ils partent faire des randonnées à vélo. A cinq, dix ou vingt, en fonction de la météo les vélos sont de sortie, sur la route ou les chemins de terre, ils profitent d’une région juste magnifique. Tous seront accueillant, plein d’énergie, avec l’envie de nous faire partager leur culture et leurs routes. Un vrai bonheur pour nous d’être entouré ainsi.

Nous aurons le droit à un premier arrêt impromptu. Philippe vient de crever. Et nous voilà tous arrêtés à démonter le pneu pour le réparer dans une station-service. A trois ou quatre dessus, il faudra une bonne dizaine de minutes avant de repartir vers notre deuxième arrêt un peu plus loin. Une petite maison avec un poêle salvateur compte tenu des basses températures de la journée. Une première tournée de thé bien chaud pour nous réchauffer, avant, qu’intrigué par le thé bu par le plus jeune des cyclistes, que nous soit resservi un deuxième thé à l’orange. Très sucré, c’est un délice à boire. Nous nous arrêterons un peu plus loin dans une nouvelle station-service avant d’entendre au loin du bruit. Celui d’un mariage. Nous repartons à peine que nous voilà invité à participer au mariage. Un petit papy se met à jouer du tambour par terre pour nous accueillir. Vélos posés, les filles sont emmenées pour danser avec les autres femmes. Les hommes ne mettront pas bien longtemps avant eux aussi d’être entrainé pour danser avec tout le monde. Séances photos et vidéos, nous sommes sur Facebook en moins de temps qu’il n’en faut pour le dire. Petite pause dans le mariage pour nous servir un nouveau thé que nous buvons avec grand plaisir. Puis nous avons à peine le temps de le finir que nous sommes entrainés dans une danse traditionnelle. Nous tournerons en rond en sautillant tout en se tenant par les petits doigts. Les femmes dans un premier cercle, les hommes autour dans un autre cercle. Cela sera sur cette dernière danse que nous quitterons le mariage. Il s’agissait là du début du mariage. Toute la famille attendant les invités, avant de pouvoir aller chercher les mariés qui se trouvent dans une autre maison pour enfin commencer les festivités. Nous repartons avec un énorme sourire d’avoir pu voir cela.

La suite, c’est un nouvel arrêt quelques kilomètres plus loin, aux portes de Selime, pour prendre un nouveau thé dans un établissement qu’ils fréquentent régulièrement lors de leurs balades. Nous pouvons rajouter deux nouveaux thés à notre compteur de la journée, dont un nouveau au goût fruits rouges. Entre temps, nous avions fait un arrêt dans un site archéologique fermé au public à cette saison. Ils ont réussi à le faire ouvrir pour nous. Là, nous avons pu admirer des fouilles qui mettaient en évidence les constructions des maisons à travers le temps voilà plus de 10000 ans. On pouvait observer une grosse colline devant nous. Melih nous explique alors qu’il s’agit là d’un amoncellement de maisons qui ont créé au fil du temps cette colline. Et nous pouvons alors voir que les fouilles ont mis en lumière plus de 7 ou 8 strates de maisons. Impressionnant. Il faut aussi parler de la traversée d’une sorte de forêt avec une petite rivière. Pour eux en mountain bike, pas de problème, pour nous c’était autre chose. Kikinette va pour traverser quand le plus jeune, Niyazi, vient alors se mettre à l’eau pour l’aider. Une gentillesse extrême pendant toute la journée de sa part. Philippe lui préfèrera rouler sur l’eau. Puis nous voilà à repartir du centre de Selime, après nos deux thés. Il est presque 15h00, nous sommes tous affamés, eux comme nous. Ils avaient fait les courses pendant l’arrêt. Notre point de chute n’était plus très loin. Nous entrons alors dans la vallée d’Ilhara en rang serré par un petit chemin sinueux en terre. Et là, nous posons nos vélos sur le bas-côté. Melih nous montre une cave en flanc de falaise. Cela sera nous dortoir pour la nuit, mais surtout notre camp de base pour le reste de la journée.

Le bois est brisé en petit, les voilà à allumer un petit feu. Melih sort alors ce que nous pensions être des saucisses. Il leurs enlèvera la peau, les malaxera, puis les empalera sur des bouts de bois pour en faire des sortes de brochettes. Les flammes s’élèvent déjà bien, et nous voilà tous autour à faire griller notre viande avant de les mettre dans le pain. Les sandwichs sont vites engloutis par tous avec un petit verre de vin, de jus ou de ayran. La simplicité de la chose est tellement effarante, qu’il est bon de profiter de ce genre de petits moments de convivialité tous ensemble autour d’un bon barbecue et de discuter de tout et rien. L’heure est bien avancée, et certains cyclistes doivent s’en rentrer. Nous les saluons alors avant nous aussi de repartir avec Melih vers le site de Selime. Nous avions visité un peu plus tôt dans la journée certaines caves avec le groupe sur le chemin. C’était assez déjà impressionnant d’y entrer et de voir ce que l’homme pouvait réaliser il y a si longtemps. Le site de Selime était encore plus impressionnant, avec des « cathédrales » gigantesques, parsemées de caves ayant chacune leur utilité propre. Nous voilà tous les quatre à arpenter le site en long, en large et en travers pour ne rien louper. Le soleil venait de montrer le bout de son nez pour nous faire profiter de toute la beauté du panorama. En haut, nous avions une vue sur toute la vallée qui laissait sans voix. Le temps de bien visiter le site, Melih nous attendait en bas pour nous proposer d’aller avec un ami à lui voir le lac de Güzelyurt. Ni une, ni deux, nos vélos sont posés comme ça à côté du restaurant, et nous voilà en voiture. Son ami est photographe et a réalisé un livre sur tous les chemins à réaliser dans la région d’Askaray. Nous y découvrons de magnifiques photos, nous laissant rêveur sur nos prochaines destinations. Le temps de descendre au lac, de prendre quelques photos de notre côté, d’avoir bien froid avec le vent qui soufflait, nous repartons aussi vite. Le temps n’était pas assez bien pour l’ami de Melih afin de réaliser ses photos de coucher de soleil. Nous sommes un peu soulagés, car nous ne nous voyons pas rester une heure de plus dans ce froid à attendre le coucher de soleil. 

Déposé à nos vélos, nous repartons vers notre grotte pour y voir que le groupe avait grandi. Trois autres personnes s’étaient jointes à nous pour la soirée barbecue. Nous y découvrirons un type de cuisine au feu assez particulière. Deux poulets plantés dans du bois, recouverts dans une boite métallique, avec un bon feu brûlant autour. Ils feront cuire comme ça les poulets pendant une bonne quarantaine de minutes. Le résultat était bluffant et excellent. Une fois le feu écarté, le bidon retiré, les poulets étaient d’une bonne couleur, mais surtout très tendre. Tout le monde les prend en photo, puis ils sont enlevés et posés sur deux pains. Nous mangerons tous assis autour, à prendre des morceaux avec les mains et avec du pain. Le meilleur poulet que nous ayons pu goûter. Les saveurs prennent un tout autre sens. On rigole, on parle, puis un nouveau grand feu est allumé pour passer le reste de la soirée. Certains s’en vont, d’autres comme Mehmet arrivent. Une bouteille passe, puis des gâteaux, et nous voilà à chanter quelques chansons sur la demande de Melih qui voulait en entendre. Laurène sort alors son Ukulélé pour entamer la chansonnette. Les heures passent, minuit pointe son nez, la plupart s’en vont en voiture ou moto. Melih et un ami à lui s’en vont en bord de rivière pour dormir dans leur tente pour la nuit. Nous les entendrons chanter bien fort pendant un bon moment. Pour nous, c’est direction la cave pour se blottir dans nos sacs de couchage à même le sol. Notre première nuit de ce style !

Jour 49 – Selime à Gülağaç

Dormir dans une cave est quelque chose d’assez unique, surtout ce type de cave dans cette région du monde où il s’agit du travail de l’homme qui a façonné l’endroit. Les quelques ouvertures nous permettent d’admirer le ciel, ses étoiles en pleine nuit, mais surtout de laisser filtrer le soleil dès ses plus basses heures. Cela ne réveillera que Kiki, les trois autres dormant à point fermé quand Melih monta nous voir vers 9h00. Il était l’heure pour lui de partir et récupérer son vélo qu’il avait laissé dans notre cave. Un dernier au-revoir pour Kiki et le voilà reparti. Le temps de commencer à faire un feu à l’extérieur pour faire chauffer le thé, que toute la joyeuse bande se réveille petit à petit. Et là, nous nous rendons compte que Melih et ses amis nous avaient laissés énormément de nourriture, dont des « saucisses ». Le feu étant allumé, nous voilà à réaliser nous-même nos brochettes et à les faire cuire de bon matin comme nous avions pu le voir la veille. Nous pensions être tranquille pour prendre notre petit-déjeuner, mais c’était sans compter sur la visite impromptue d’un agent de sécurité du parc. Nous le voyons passer une première fois en moto sur la route, sans qu’il s’arrête pour nous, avant qu’il ne revienne un moment plus tard pour grimper nous voir.

Un petit jeune, plutôt sympathique au premier abord, qui ne nous dit pas que c’est interdit ou autre chose. Il vient voir ce que nous faisons, regarde dans la cave, voit toutes nos sacoches et vélos. Nous comprenons rapidement que nous devons plier bagages. Tout le temps que nous mettrons à finir de manger et ranger nos affaires, il restera là à nous regarder sans dire un mot. C’était assez bizarre de se sentir observé comme ça. Il se passera presque une heure entre son arrivée et notre départ sur les vélos. Entre temps, nous avons eu le droit à un petit coup de chaud de la part de Kiki. En descendant ses bagages, sa paire de lunettes tombent sur la roche. Kiki se dit qu’il ira les chercher au prochain passage vu qu’elles sont sur la roche bien posée. Mais en remontant, elles ont « disparu ». Il ne faudra pas longtemps pour comprendre que c’est l’agent qui les aura pris. Il faudra une bonne dizaine de minutes alors, lui expliquer à plusieurs reprises, s’énerver un petit peu, pour qu’enfin, comme par magie en remontant avec l’agent à la cave, il les retrouve caché dans un petit bosquet en contrebas. Kiki fera semblant de le remercier chaleureusement pour son aide dans la découverte des lunettes afin qu’il n’y ait pas de problème. Le plus gros problème étant pour nous le fait que l’agent nous ait demandé de mettre toutes nos poubelles au feu, au lieu de les mettre à la poubelle comme nous voulions le faire. Il y avait des bouteilles en verre, en plastique et une boite métallique sur un petit feu dormant. Comment voulez-vous que cela brûle… Nous partons un peu dégoûtés de laisser un coin de nature aussi magnifique aussi vandalisé à cause de nous. Les déconvenues qui arrivent au quotidien…

Pieds sur les pédales, nous reprenons la route pour une petite dizaine de kilomètres. Objectif de la journée, visiter la vallée d’Ilhara. Après une belle montée qui nous offre une vue sur la plaine environnante et au loin sur les montagnes enneigées qui se découpent dans le paysage, nous arrivons rapidement à notre objectif du jour. Là, nous laissons toutes nos affaires et vélo à l’entrée du site. Nous les attachons juste. C’est vraiment agréable en Turquie de pouvoir laisser tout comme ça, sans se soucier de ne plus les voir à notre retour. Il y a un respect assez important à ce niveau-là qui nous laisse toujours rêveur quand on compare à chez nous. Nous remplissons nos sacs avec un peu de nourriture qui nous servira pour pique-niquer un peu plus tard dans la journée. Il est midi et nous entrons dans la vallée. Par le haut de celle-ci. Une longue volée de marches s’offre à nous pour arriver dans le lit de la rivière qui sillonne la vallée. Là, commence notre exploration de la journée. Si pendant la première partie, nous restons sagement sur le côté droit, remontant vers le village même d’Ilhara, la deuxième sera toute autre. Dans la roche, des ouvertures ici et là. A l’intérieur, des pièces de vie des hommes d’un autre temps. Plus ou moins grandes, nous découvrons parfois des galeries creusées dans la roche. La vallée est connue principalement pour ses entités religieuses assez bien conservées. Nous en visiterons plus de cinq ou six sur quelques kilomètres seulement. Des Eglises encastrées dans la pierre, aux formes très rudimentaires, mais qui donnent des frissons en y entrant dedans. Le génie humain de l’époque était impressionnant. 

L’envie nous prend alors de nous rendre sur l’autre rive. Nous avions vu des ponts sur le chemin, mais face à nous un énorme tronc d’arbre fait office de parfait passage. Kiki s’engage le premier avant de faire demi-tour se disant que cela allait être trop compliqué. Philippe y va à son tour puis revient aussi. C’est Laurène qui nous montre à tous la bonne technique. Assis sur le tronc à pousser avec nos mains pour faire de petits bonds. Laurène de l’autre côté, nous passerons un par un au-dessus de la rivière pour continuer notre chemin. Là, un petit abri fera office de pause déjeuner pour la journée. Victuailles et restes de la veille sur la table, nous mangeons un petit bout à l’ombre des arbres. Arbres que le drone de Kiki prendra en pleine face, lui cassant une hélice et lui abimant les trois autres. Poisse quand tu nous tiens. Le temps de récupérer le drone dans les ronces, et nous voilà à plier bagages pour continuer notre chemin. Chemin qui s’arrêtera net à un moment, ne nous permettant plus de passer. Ni une, ni deux, nous décidons de passer par les hauteurs où d’énormes blocs de pierres semblent créer un passage. Avec plus ou moins de facilité, nous explorerons ainsi pendant une bonne heure toutes les caves à flanc de falaise qui sont normalement hors du chemin et pratiquement inaccessibles. Nous découvrirons ainsi des lieux juste fantastiques, hors du temps, qui nous font rêver. Nous nous posons énormément de questions sur l’utilisation même de ces caves, des différentes aspérités que nous pouvons y trouver à l’intérieur comme de l’utilisation des trous. Mais par manque d’informations sur le site, nous ne pourrons que contempler et rester avec mille et une questions sans réponse. 

Le temps de retrouver notre chemin à travers les rochers, nous retombons sur la rivière qui nous amène vers notre point de départ. Les marches derrière nous, décision est prise de reprendre la route et d’essayer de trouver en chemin une pension pour la nuit. Nous roulerons pendant un bon moment alors que le soleil baissait et que les températures suivaient la même courbe, entourés par des paysages tantôt vallonnés, tantôt plat, avec toujours les montagnes enneigées comme toile de fond. Au loin, nous apercevons ce qui semble être une « petite » ville turque. Cela sera notre point de chute de la journée. Nous y entrons et commençons à en faire le tour à vélo à la recherche d’une pension ou d’un hôtel. Rien. Aucun panneau. Il semblerait que cette ville n’en possède pas. Nous nous arrêtons alors pour demander à une personne si elle savait où nous pouvions en trouver. Elle demande autour d’elle, puis un homme arrive. Il nous ouvre les portes de sa boutique et nous dit qu’il a des chambres juste au-dessus. Nous regardons l’écriteau, et nous disons que rien ne nous aurait permis de trouver cette pension. Nous demanderons toujours maintenant pour être sûr de trouver ce type d’endroit assez simple et économique. Les vélos déposés dans la boutique, nous montons les affaires dans notre dortoir. Quatre lits avec leurs sublimes couettes roses. Nous rigolons un bon coup, avant de voir la salle de bain qui nous fera rire encore plus. Un toilette à la turc avec un pommeau de douche au-dessus. Extrême ! Cela ne nous dérangera pas le moins du monde pour nous laver. Ni pour nous faire un bon repas maison dans notre chambre avec nos réchauds. Il faut dire que Laurène et Philippe sont équipés. Casseroles, poêle, planche à découper. Parfait pour se faire des petits légumes et du riz. Un bon repas et au lit !

Jour 50 – Gülağaç à Derinkuyu

Comme la veille, nous prenons notre temps, n’ayant que très peu d’impératifs dans la journée. Juste celui de visiter la région et ses beautés cachées. Nous n’avions qu’une quarantaine de kilomètres à faire, et devions les faire assez rapidement. Mais le mot rapide n’est jamais bon à prononcer en voyage. Quelques kilomètres seulement après le départ, nous voilà tous arrêté sur le bord de route. Kiki d’abord s’aperçoit que son fil de dynamo s’enroule et risque de se couper. Desserrage de la roue avant, puis extraction avec précaution du fil pour enfin tout bien repositionner. Il en fallait peu pour que le fil ne se sectionne si jamais nous avions continué à rouler. Puis c’était au tour de Kikinette, qui avait le même problème sur sa dynamo. Pour elle par contre, son fil était bien à l’air. Rajout d’un bout de double face pour protéger, et resserrage de la roue avant. Nous pensions être prêt à repartir quand Kikinette pousse son vélo et s’aperçoit que son frein arrière ne se serre plus. Elle nous montre bien à deux reprises le problème, avant de se rendre compte que collant en Merinos s’était en fait coincé dedans pendant le séchage sur les vélos. Un beau trou dans le bas du collant et beaucoup de fils dans les freins. Rebelote, Kiki ressort tous les outils, démonte maintenant la roue arrière et inspecte le frein pour lui enlever tous les petites peluches de laine. La bonne nouvelle dans l’histoire, c’est le soleil bien haut dans le ciel qui nous réchauffe plus qu’au départ de la journée.

Nous repartons enfin. Une petite route dans un paysage quasi désertique, avec des collines et montagnes comme paysage. Ici et là quelques champs en culture. Rien de plus, rien de moins. Mais comparé à la route après Konya, cette route était à l’exact opposé. Nous pouvions la regarder des heures sans problème avec les yeux grands ouverts. Nous ne la contemplerons pas autant puisque la ville de Derinkuyu était déjà devant nous. La route a été rapide, et la composition de l’équipe identique aux jours précédents. Kiki et Philippe devant, voir loin devant. Kikinette et Laurène derrière à papoter comme il se doit pour profiter de la balade sous le soleil. Ici, le trafic est carrément absent. Quelques voitures et bus nous doubleront, mais rien de bien méchant. Il est plus de 14h30 quand nous arrivons dans le centre et nous posons à la terrasse d’un restaurant. Un döner et un ayran plus tard, les filles partent acheter « quelques » glaces au supermarché d’à côté. Nous aurons le droit à trois petits magnums chacun pour nous refroidir avec la chaleur ambiante. Mais nous n’aurions pas pu partir du restaurant sans se faire offrir le thé. Froid et chaud en même temps étant assez compliqué, notre choix cornélien fait, un guide du coin engage la conversation. Il nous indiquera une petite pension à l’angle de la rue qui sera parfaite pour la nuit. Le temps de grimper au dernier étage, de se taper tous la tête contre le plafond dans les escaliers, nous avons un étage pour nous et trois lits dans chaque chambre. Nous noterons une déco assez spéciale avec des radiateurs en haut des murs. Un détail qui change tout.

Pas le temps de s’attacher à tout ça que nous nous dirigeons vers la ville souterraine. Au passage, une grande église nous appelle. Nous pensions pouvoir la visiter, mais celle-ci est complètement fermée. Nous pourrons seulement l’admirer de l’extérieur à l’aide d’un guide « très spécial ». A peine nous passons la grande porte, qu’un homme s’approche de nous, commence à nous parler en Turc, puis essaye de nous montrer pleins de détails sur la façade pour être notre « guide ». Il nous répète seulement que c’est spécial, spécial. Il tourne des piliers pour les faire bouger, nous montre un petit trou dans une porte pour regarder à l’intérieur, et voilà. A l’intérieur, il n’y avait plus rien, que de la pierre nue, sans autre objet ou peinture. Nous quitterons notre guide d’un temps pour pouvoir enfin entrer dans la ville souterraine. L’une des plus grandes de la région. Pas de guide, pas d’informations sur les pièces, pas d’histoires à se mettre sous la dent. Nous l’explorerons juste entièrement, tant que nous n’étions pas bloqués par le vide ou par les rochers. Il n’y avait que des flèches pour nous indiquer notre chemin afin de ne pas nous perdre indéfiniment à l’intérieur. Parfois à quatre pattes, souvent le dos courbé, il pouvait être dur de se mouvoir dans les différents passages. Nous nous demandons si ce n’était pas le repaire des nains ici-bas dans le temps. Il faut dire que l’espace pour les géants était limité sauf si évoluaient en rampant. Plus nous avancions dans ce dédale souterrain, plus nous restions fascinés par cette réalisation de l’homme. Partout, dans toutes les directions s’étendaient la ville souterraine. Des centaines voire des milliers de personnes pouvaient très certainement loger dans cet immense espace. Parfois nous tombions sur des pièces qui devaient être des chambres ou des pièces communes compte tenu de la hauteur sous plafond (qui ne dépassait rarement les deux mètres). Parfois dans ce qui devait être le lieu de culte vu la forme en croix de l’espace. C’est dans ce même espace, tout au fond de la ville, que nous avons décidé dans un premier temps d’entamer la chansonnette pour sa bonne résonnance. Puis, voyant que des gens arrivaient par le petit tunnel où nous devions remonter, nous nous sommes mis à les accueillir avec une Ola dans un deuxième temps. Puis plus il y avait de monde qui descendait, plus les gens s’associaient avec nous pour la faire. C’était assez fun. Pas autant que notre course le dos courbé pour remonter jusqu’à la surface. Nous aurions pu nous croire dans Indiana Jones… Quelques secondes seulement, sans la pierre qui roule et tout le reste.

Une fois à l’extérieur, la chaleur nous pousse à nous sacrifier pour la bonne cause. Un bon jus de fruit frais et une crêpe locale nous permettront de surmonter la journée qui venait de s’écouler. Juste assez pour nous pousser à faire les courses pour le repas du soir. Nous pensions faire juste quelques légumes, puis nous passons devant une boucherie qui exposait une énorme tête de bœuf. Photos souvenirs avec le boucher, puis le voilà qu’il nous invite à boire le thé à l’intérieur. Improbable, mais Turc. Là, voyant le boucher s’affairer sur un magnifique bout de viande, il ne nous en a pas fallu plus pour lui demander de nous couper 800g pour faire notre repas. Une petite bouteille de vin, quelques champignons et du beurre achetés plus loin, nous voilà bon pour cuisiner sur le palier de notre étage. Le gérant est même venu à un moment nous apporter une petite table pour ne pas nous laisser manger par terre. Extraordinaire. Il a fallu faire un bon courant d’air à la fin du repas pour enlever au maximum l’odeur du graillon. Mais qu’est-ce que c’était bon de pouvoir se faire cuire notre propre viande ! C’est l’estomac bien rempli que nous pourrons nous coucher cette nuit.

Data depuis le début  

  • Kilomètres parcourus : 758,92
  • Temps de déplacement : 2j21h25m44s
  • Altitude : 5536+ / 5085-
  • Calories dépensées par personne : 24561

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